Comment organiser la journée de solidarité dans l’entreprise ?

La journée de solidarité a été instituée par la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées.

Créée afin d'assurer le financement d’actions en faveur de l'autonomie des personnes âgées et handicapées, elle prend la forme d'une journée supplémentaire de travail non rémunéré pour les salariés et, pour les employeurs, de la contribution solidarité autonomie assise sur les salaires (Cf. article L.3133-7 du Code du travail).

En quoi consiste la journée de solidarité ?

Quels salariés sont concernés ?

Comment mettre en place cette journée en 2025 et à quelle date la positionner ?

Quelles sont les conséquences de cette journée sur la durée du travail et la rémunération des salariés ?

Quelles sont les sanctions possibles pour le salarié refusant de l’effectuer ?

Le cabinet Siléas vous propose de faire le point sur les modalités de mise en place de la journée de solidarité ainsi que sur ses incidences pratiques.

 

  1. En quoi consiste la journée de solidarité ?

Aujourd'hui, les dispositions de la loi de 2004 figurent aux articles L.3133-7 à L.3133-11 du Code du travail. L’article L.3133-7 du Code du travail dispose que la journée de solidarité prend la forme :

  • D’une journée de sept heures de travail non rémunérée pour les salariés à temps plein
  • D’une contribution pour les employeurs

Les employeurs versent périodiquement 0,30 % de la masse salariale brute au titre de la cotisation pour l’autonomie (Cf. article L.14-10-4 du Code de l’action sociale et des familles). Cette cotisation, exclusivement patronale, est reversée par le biais des URSSAF à une caisse constituée à cet effet : la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

En contrepartie, chaque salarié doit travailler une journée supplémentaire chaque année, l’article L.3133-8 limitant sa durée à 7 heures de travail effectif pour les salariés à temps plein.

Pour les salariés à temps partiel, la limite de sept heures est réduite proportionnellement à la durée contractuelle prévue.

 

  1. Quels salariés sont concernés ?

Le principe est que tous les salariés du secteur privé et agricole participent à la journée de solidarité, qu’ils soient embauchés en CDD ou en CDI, à temps plein ou à temps partiel.

Ainsi, les catégories particulières de salariés tels que les VRP, les travailleurs à domicile ou encore les journalistes doivent également réaliser la journée de solidarité (Circ. DRT 10 du 16-12-2004).

Il existe néanmoins des exceptions pour :

  • Les stagiaires dans la mesure où ils ne disposent pas du statut de salarié
  • Les salariés de moins de 18 ans si la journée de solidarité est réalisée un jour férié, les mineurs ne pouvant pas travailler les jours fériés légaux, sauf dérogations pour certains secteurs particuliers ( articles L.3164-6 à L.3164-8 du Code du travail visant les industries fonctionnant en continu).
  • Les salariés se trouvant en congés payés, en arrêt maladie ou en congé maternité à la date où la journée de solidarité est réalisée. Ces salariés n’auront donc pas à la rattraper.

Nous vous précisons que le salarié a la possibilité de vous demander de prendre un jour de congé payé ou de RTT le jour durant lequel la journée de solidarité a été fixée. Vous n’êtes toutefois pas tenu de faire droit à sa demande.

En revanche, si vous l’acceptez, vous ne pourrez pas demander au salarié de revenir effectuer la journée de solidarité durant ce congé.

Le cas spécifique du salarié ayant déjà réalisé la journée de solidarité :

Si l’un de vos salariés a déjà accompli une journée de solidarité durant l‘année en cours au sein d’une autre entreprise avant d’intégrer vos effectifs, deux solutions s’offrent à lui :

  • Soit effectuer la journée de solidarité au sein de votre entreprise. Cette journée devra donc lui être rémunérée et elle s’ajoutera au contingent d’heures supplémentaires annuelles (ou complémentaires en cas de temps partiel) et donnera lieu à contrepartie obligatoire sous forme de repos (C. trav., art. L. 3133-10).
  • Soit refuser d'exécuter cette journée de travail, sans que ce refus constitue une faute ou un motif de licenciement (C. trav. art. L 3133-10).

 

  1. Comment mettre en place la journée de solidarité en 2025 ?

Les modalités d’accomplissement de cette journée peuvent être fixées soit :

  • Par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par convention ou accord de branche (Cf. article L.3133-11 du Code du travail)
  • En l’absence de dispositions conventionnelles, par décision de l’employeur, après consultation du comité social et économique s’il existe (Cf. article L. 3133-12 du Code du travail).

Les dispositions précitées donnent donc la priorité aux négociations menées au sein de l’entreprise ou de l’établissement, l’accord de branche ne s’appliquant qu’à défaut d’accord d’entreprise.

Cet accord devra préciser le jour retenu pour effectuer la journée de solidarité et ne pourra pas se contenter de renvoyer à une décision unilatérale de l’employeur.

Les dispositions de l’accord, ou à défaut celles de la décision de l’employeur, peuvent également permettre de préciser les incidences de cette journée sur la durée du travail, la rémunération et prévoir comment seront abordés les cas particuliers (ex : salariés ayant changé d’employeurs, jeunes travailleurs, etc…).

 

  1. A quelle date fixer la journée de solidarité en 2025 ?

Initialement, la journée de solidarité devait être réalisée le lundi de Pentecôte.

Cependant, les dispositions du Code du travail ont été assouplies par la circulaire DRT n°14 du 22 novembre 2005 et par la loi du 16 avril 2008, n’imposant plus de jour précis pour la réaliser.

La date de cette journée peut donc varier au sein de chaque entreprise, le but étant de rajouter l’équivalent en heures d’une journée de travail supplémentaire au cours de l’année.

Il peut donc s’agir :

  • Soit d’un jour férié précédemment chômé (à l’exception du 1er mai, qui reste obligatoirement chômé et payé) ;
  • Soit d’un jour de repos accordé au titre d'un accord collectif aménageant le temps de travail conclu en application de l’article L.3121-44 du Code du travail ;
  • Soit de tout autre modalité permettant le travail de 7 heures précédemment non travaillées en application d'une convention ou d'un accord collectif ou des modalités d'organisation de l'entreprise (C. trav. art. L 3133-11), comme un samedi ou un jour de RTT

La journée de solidarité ne peut être effectuée un dimanche dans la mesure où la loi ne modifie pas les textes du droit commun relatifs au repos dominical des salariés. Ainsi, si votre entreprise ne bénéficie pas d’une dérogation au repos dominical, le dispositif de la journée de solidarité ne vous permettra pas de faire travailler vos salariés le dimanche (Circ. du 16 déc. 2004).

La journée de solidarité peut également être fractionnée en heures, sous réserve que le fractionnement soit effectif et corresponde à un travail supplémentaire des sept heures par an exigées (Circ. DRT nº 14, 22 novembre 2005 ; CE, 6 septembre 2006, n° 281711).

L’accord collectif, ou à défaut la décision de l’employeur, doit prévoir les modalités du fractionnement pour les salariés placés dans une « situation particulière », comme ceux travaillant en convention annuelle de forfait jours ou heures, ou ceux travaillant à temps partiel (cf. article L. 3133-11 du Code du travail). A ce titre, la journée de solidarité est nécessairement fractionnée lorsque :

  • Les salariés travaillent 6 jours sur 7 sans jours fériés chômés ni jours de RTT et bénéficient des seuls congés payés légaux
  • Des salariés effectuent des prestations auprès de plusieurs entreprises utilisatrices (cas des entreprises de nettoyage intervenant pour le compte de plusieurs sociétés)
  • Les modalités de prise du repos hebdomadaire conduisent à y inclure le lundi matin, dans les cas où la journée de solidarité correspond au lundi de Pentecôte (Circ. DRT du 20-4-2005).

En principe, la date de la journée de solidarité est la même pour tous les salariés de l’entreprise.

Néanmoins, une individualisation est possible afin de prendre en compte les spécificités précitées, propres à certains salariés. Une individualisation est également possible dans le cas des entreprises ouvertes toute l’année et celles fonctionnant en continu (Circ. DRT nº 2004/10, 16 décembre 2004).

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Cas particulier du salarié à temps partiel travaillant pour le compte de plusieurs employeurs :

  • Si le salarié est employé à temps partiel par plusieurs employeurs, il doit effectuer la journée de solidarité chez chacun, au prorata de sa durée contractuelle de travail.
  • Si le salarié a simultanément une activité à temps plein et une à temps partiel, la journée de solidarité s’effectue dans l’entreprise où s’exerce le temps plein.

 

  1. L’incidence de la journée de solidarité sur la durée du travail du salarié
  • Pour les salariés au forfait-jours (dont la durée du travail est fixée en jours sur l’année et non en heures), le nombre de jours travaillés est fixé à 218 jours par an, journée de solidarité comprise ( article 3121-64 du Code du travail). Ainsi, la journée de solidarité est d’ores et déjà incluse dans la détermination du nombre de jours à travailler au titre du forfait.
  • Pour les salariés dont la durée du travail est fixée en heures, les heures de travail réalisées au titre de la journée de solidarité ne sont pas comptabilisées comme du temps de travail effectif rémunéré (article L3133-8 du Code du travail).

Elles ne s’inscrivent donc pas dans le contingent d'heures supplémentaires annuelles pour les salariés à temps plein, ni dans le celui des heures complémentaires pour les salariés à temps partiel (art. L. 3133-9 du Code du travail).

L’accomplissement de la journée de solidarité ne peut avoir pour effet d’entraîner un dépassement de la durée hebdomadaire maximale absolue de 48 heures (Circ. DRT nº 2004/10, 16 décembre 2004)

 

  1. L’incidence de la journée de solidarité sur la rémunération du salarié
  • Pour les salariés dont la rémunération est mensualisée, le travail accompli, dans la limite de 7 heures, durant cette journée n'est pas rémunéré (C. trav. art. L 3133-7 et L 3133-8). En revanche, les heures travaillées au-delà de ces 7 heures sont rémunérées.

Les majorations de salaire (ou repos compensateurs) prévues par convention ou accord collectif pour le travail des jours fériés ne s'appliquent pas durant cette journée de travail.

  • Pour les salariés au forfait annuel en jours, le travail accompli durant la journée de solidarité, dans la limite de la valeur d'une journée de travail, ne donne pas lieu à rémunération.

Cependant, en pratique, il est recommandé de mentionner cette journée de solidarité dans le bulletin de paie du salarié, afin d’attester qu’il l’a bien réalisée pour l’année en cours.

 

  1. Quelles sont les sanctions possibles en cas de non-respect de la journée de solidarité ?

Si un de vos salariés refuse d’effectuer la journée de solidarité, sans justification, il s’expose à des sanctions disciplinaires.

En cas d’absence injustifiée de sa part ce jour-là, vous êtes également en droit d’opérer une retenue sur salaire (Circ. DRT, 20 avril 2005, Soc. 16 janv. 2008 n° 06-43.124 et Soc. 16 janv. 2008 n° 06-42.327).

Nous vous rappelons cependant que le salarié à temps partiel dispose d’une possibilité de refus dès lors que la date prévue est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, le suivi d’un enseignement scolaire ou supérieur, une période d’activité fixée chez un autre employeur ou une autre activité professionnelle non salariée (Circ. DRT nº 2004/10, 16 décembre 2004).

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En conclusion, nous attirons votre attention sur l’importance que revêt l’information des salariés quant à la date fixée pour réaliser la journée de solidarité. Il est en effet essentiel que les modalités soient formalisées clairement chaque année, notamment via une note de service, un avenant au règlement intérieur ou un accord collectif.

POINTS ESSENTIELS A RETENIR :

  • La journée de solidarité est obligatoire, mais sa date peut être fixée librement par accord ou décision unilatérale
  • Elle correspond à 7 heures de travail non rémunéré pour les salariés à temps plein
  • Elle est assortie d’une contribution employeur spécifique
  • Les modalités doivent être adaptées et anticipées, en particulier pour les salariés à temps partiel ou en situation particulière