Depuis le 1er janvier 2017, l’employeur ou le salarié en désaccord avec l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail peut contester cet avis en saisissant le Conseil de prud’hommes.
Dans un arrêt du 2 juin 2021, la Cour de cassation a précisé que le point de départ du délai de contestation courait à compter de la notification de l’avis, et non à compter de la notification des éléments médicaux justifiant la position du médecin du travail (Cass. Soc. 2 juin 2021, n°19-24.061).
Le cabinet SILEAS vous informe sur les modalités de contestation d’un avis d’inaptitude et sur les conséquences de cette dernière.
Quelle est la procédure de contestation d’un avis d’inaptitude ?
La contestation de l’avis d’inaptitude s’effectue par saisine du Conseil de prud’hommes selon la procédure accélérée au fond.
Cela signifie que la procédure suit le cours d’une procédure en référé mais que le juge exerce les pouvoirs dont dispose la juridiction au fond et statue au moyen d’une ordonnance qui a autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’elle tranche.
Le délai de contestation est de 15 jours à compter de la notification de l’avis rendu par le médecin du travail (Cass. Soc. 2 juin 2021, n°19-24.061).
Le demandeur doit informer le médecin du travail – même si ce dernier n’est pas partie au litige - de cette saisine. (C. trav., art. L. 4624-7).
La contestation ne peut porter que sur les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail.
Elle ne peut pas porter sur les règles de procédure de contestation de l’inaptitude prescrites par les dispositions légales et règlementaires (Cass. Soc., avis n°15002, 17 mars 2021) ni sur l'origine professionnelle de l'état de santé du salarié, l'impossibilité matérielle de mettre en œuvre les préconisations du médecin ou le non-respect de celles-ci par l'employeur (QR min. trav. du 26-10-2020).
Que peut ordonner le CPH saisi d’une contestation d’avis d’inaptitude ?
Une fois saisi d’une contestation, le Conseil de prud’hommes peut confier toute mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent (C. trav., art. L.4624-7).
Il ne s’agit que d’une possibilité et non d’une obligation.
Ainsi, le Conseil de prud’hommes peut estimer qu’il n’est pas nécessaire de confier une mesure d’instruction au médecin inspecteur du travail, notamment s’il considère que les éléments versés aux débats par les parties permettent de trancher le litige sans que d’autres mesures ne soient utiles.
Dans l’hypothèse où une mesure d’instruction est confiée au médecin inspecteur du travail, le Conseil de prud’hommes définit la mission d’expertise sous forme de questions et impartit un délai à l’expert, ce délai devant être raisonnable (CPC, art. 265).
Dans le cadre de sa mission, les pièces médicales contenues dans le dossier médical tenu par le médecin du travail sont remises à ce dernier, avec l’accord du salarié. Le salarié a la possibilité de s’opposer à cette communication mais il ne pourra pas refuser un examen médical par l’expert.
Le médecin inspecteur du travail a la faculté de se faire assister par un tiers et peut également entendre le médecin du travail (C. trav., art. L.4624-7).
Il peut se déplacer sur site afin de réaliser l’étude de poste, éventuellement en présence des parties au litige et de leurs avocats. Le médecin inspecteur du travail reçoit les parties, afin de leur exposer ses conclusions et recevoir leurs observations avant l'audience du Conseil de prud'hommes (QR min. trav. du 26-10-2020).
A la fin des actes qu’il juge nécessaires, le médecin inspecteur du travail remet un rapport d’expertise au Conseil de prud’hommes dans lequel il répond aux questions qui lui ont été posées, tout en veillant à respecter le secret médical.
En parallèle des mesures d’instructions, l’employeur ne pouvant pas accéder aux éléments médicaux ayant fondé les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail compte tenu du secret médical, peut mandater un médecin à qui seront notifiés ces informations. Il doit toutefois en informer le salarié.
Quelles sont les conséquences pour l’employeur de la décision rendu par le Conseil de prud’hommes ?
A l’issue de l’expertise, les parties sont convoquées devant le Conseil de prud’hommes, étant précisé que la présence de l’expert n’est pas requise.
La décision rendue par le Conseil de prud’hommes, tranche le litige et se substitue aux avis, propositions, conclusions écrites ou indications du Médecin du travail contestées.
Ainsi, le Conseil de prud’hommes doit préciser si le poste de travail du salarié est compatible avec l’état de santé du salarié et si des aménagements doivent y être apportés ou si le salarié est inapte à l’occuper.
Il ne doit pas indiquer les raisons médicales permettant de rendre cette décision car celles-ci sont couvertes par le secret professionnel.
Les conséquences de la décision du Conseil de prud’hommes pour l’employeur sont les suivantes :
- Si le Conseil de prud’hommes rend une décision qui prononce un nouvel avis d’inaptitude
Pour rappel, si au terme d’un délai d’un mois à compter de l’avis d’inaptitude, le salarié inapte n’est ni reclassé, ni licencié, l’employeur doit reprendre le paiement des salaires.
Ce délai n’est pas suspendu par la saisine du Conseil de prud’hommes.
Ainsi, dans l’hypothèse où un nouvel avis d’inaptitude est rendu, un nouveau délai d’un mois court à compter du prononcé de la décision du Conseil de prud’hommes. Le paiement des salaires doit être repris si le salarié n’est ni licencié, ni reclassé, dans ce délai d’un mois.
- Si le Conseil de prud’hommes annule l’avis d’inaptitude
Cette annulation entraine une nouvelle suspension du contrat de travail.
Elle ne fait pas disparaitre rétroactivement l’obligation pour l’employeur de reprendre le paiement des salaires à l’issue du délai d’un mois après l’avis d’inaptitude.
Ainsi, les salaires restent dus au salarié jusqu’à la nouvelle suspension du contrat de travail résultant de l’annulation (Cass. Soc. 28 avril 2011 n° 10-13.775).